Le Co-développement professionnel : une pratique d’apprentissage collectif

Progresser vers une solution et apprendre ensemble : tel est le but du co-développement, une pratique de facilitation conçue pour amener chaque membre d’un groupe donné à améliorer sa pratique professionnelle personnelle, en explorant collectivement de nouvelles pistes. Sa principale caractéristique tient à cette manière de s’appuyer sur le groupe et sur les interactions qui le traversent. Malléable, adaptable, la méthode peut venir compléter un dispositif de formation existant, constituer un levier d’amélioration des compétences au sein de groupe de pairs ou accompagner une démarche d’excellence opérationnelle. En favorisant le partage d’expérience et la diffusion de bonnes pratiques, elle poursuit un objectif on ne peut plus concret : développer une dynamique collective d’apprentissage, une méthode capable de générer des réponses et des solutions à un problème, une préoccupation ou un nouveau projet.

Repère :

Le co-developpement professionnel est né au Canada, où il a été conçu et développé voici une vingtaine d’années par Adrien Payette et Claude Champagne.

Un cadre simple et récurrent

Chaque session de Co-développement professionnel réunit de 6 à 8 personnes pour une durée d’une demi-journée. Ainsi, chacun conserve la concentration et la fraicheur d’esprit nécessaire. Pour maintenir une certaine cohérence, le groupe reste de manière générale stable d’une séance à l’autre.

Comment ça marche ?

Chaque séance tient du jeu de rôle. Un participant présente un cas de figure réel : une préoccupation ou un problème concret, préoccupation, un projet qui achoppe… Il joue ainsi le rôle du Client ; les autres participants incarnent des Consultants et l’aident à avancer dans sa réflexion en lui apportant leurs éclairages et leurs expériences et en mettant à son service idées et suggestions. Le facilitateur anime chaque session selon un protocole séquencé en sept phases. Si le processus est collectif, l’autonomie du Client est toujours respectée. Au terme de la séance, il reste seul maître des idées qu’il retiendra et du plan d’actions qu’il construira.

Repère :

Trois principes guident les séances : Confidentialité, Bienveillance et Parler-vrai.

Une pratique structurée, une technique éprouvée

Le Co-développement est une pratique éprouvée qui distingue 7 étapes successives : 1 – Choix du sujet, 2 – Exposé du sujet, 3 – Clarification, 4 – Formulation de la demande et validation du contrat, 5 – Consultation, 6 – Synthèse et plan d’action, 7 – Debriefing et apprentissages.

En pratique : un exemple de séance

Le cas détaillé ci-dessous est celui de Anaïs, responsable RH d’un groupe de Services Informatiques (les noms ont été modifiés).

Plusieurs membres du groupe viennent avec un problème, une préoccupation ou un projet qui les anime. Après deux tours de table, le sujet présenté par Anaïs sera considéré comme le plus urgent. Elle évoque le problème suivant : « Comment convaincre mon N+2 – Responsable Régional – que la nouvelle approche de développement des collaborateurs que je porte est pertinente pour l’entreprise, alors que mon N+1 ne m’écoute pas ? »

Pendant une dizaine de minutes, Anaïs présente en détails le contexte de la situation : les acteurs en présence, le déroulé des événements, mais aussi les actions qu’elle a déjà menées. Pendant cette phase, les Consultants n’interviennent pas.

Les Consultants questionnement Anaïs sur les éléments qu’elle a présentés pour affiner leur compréhension de la situation. Leurs questionnements permettent notamment de replacer son N+1 au centre des réflexions, au lieu de le considérer comme un simple obstacle parmi d’autres.

À l’étape 4, la problématique est reformulée par Anaïs pour devenir la suivante : « Quelles sont vos suggestions pour que je puisse rendre mon N+1 acteur de la nouvelle approche que je propose ? Sur un plan pratique, pouvez-vous m’aider à préparer l’entretien que j’aurai avec lui dans deux semaines ? »

A ce stade, les Consultants formulent des propositions, des suggestions, des partages d’expérience et permettre à Anaïs de collecter le maximum d’idées. Dans cette phase, Anaïs n’intervient pas et note tout ce qui est dit, y compris des suggestions qui grattent. Les Consultants agissent toujours dans le respect du principe de bienveillance. L’animateur, garant de cette dernière, stimule la divergence et la variété des idées exposées.

À l’issue de la consultation, Anaïs a retenu les idées qui l’ont interpellée. Elle a constitué une rapide sélection qu’elle a ensuite restituée au groupe, sans avoir à justifier ses choix. Elle retient notamment :
– La nécessité de travailler son discours auprès de son N+1 pour le rendre le plus impactant et plus convaincant ;
– L’importance de consacrer une prochaine rencontre autour d’un ou deux points susceptibles de soutenir sa démarche en l’appuyant sur des chiffres et des résultats neutres et objectifs.

En fin de séance, un débriefing permet à chacun de formuler ce qu’il retire de la session. Chacun expose, en commençant par le Client, comment il a vécu la séance, ce qui aurait pu être fait différemment et ses apprentissages. Le groupe a retenu les points suivants :
– L’importance de la phase de clarification : elle a permis au groupe de mieux comprendre l’environnement et l’historique de la situation que vit Anaïs ;
– La nécessité de bien poser le problème initial et de faire le ménage dans les éléments du récit afin d’éviter les fausses pistes ou les voies sans issue ;
– La richesse du partage d’expériences et de points de vue. La diversité des éclairages et des suggestions a permis d’explorer de nombreuses pistes de solutions ;
– La nécessité pour chaque Consultant de laisser s’exprimer l’ensemble du groupe, en faisant l’effort d’avoir la parole brève et pertinente.

Repère :

Le Co-développement professionnel est un complément pertinent aux démarches d’amélioration continue. Il renforce la dynamique d’apprentissage collectif, favorise la transversalité et met les collaborateurs en situation de résoudre les problématiques qu’ils rencontrent de manière plus autonome.

Le rôle de l’animateur : cadrer et protéger

Le Co-développement est une pratique cadrée. L’animateur veille au respect du cadre de référence, véritable contrat moral passé entre les participants : confidentialité, parler-vrai, bienveillance. Il garantit le bon déroulement du protocole et régule la dynamique de groupe afin de l’amener à monter en puissance en favorisant l’expression de son intelligence collective.

Les bénéfices pour l’entreprise

Outre l’aide concrète qu’il apporte au Client pour l’aider à résoudre le problème qu’il rencontre, le Co-développement professionnel contribue à réduire la crainte d’expérimenter et de changer. En ouvrant un temps de réflexion et privilégiant une approche différente, il ouvre de nouvelles portes et favorise la coopération entre des collaborateurs et des départements jusque-là isolés les uns des autres. Ce processus d’échange et d’entraide débouche sur de meilleurs résultats et pousse l’organisation à sortir de son fonctionnement en silos étanches.

Repère :

Les séances de Co-développement font appel à des compétences de facilitation spécifiques, que Kikano a développées au sein du Centre Européen du Co-développement (CECODEV) professionnel.